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Choix des épreuves.

258. A l'état errant, et avant de prendre une nouvelle existence corporelle, l'Esprit a-t-il la conscience et la prévision des choses qui lui arriveront pendant la vie ?
« Il choisit lui-même le genre d'épreuves qu'il veut subir, et c'est en cela que consiste son libre arbitre. »

- Ce n'est donc point Dieu qui lui impose les tribulations de la vie comme châtiment ?

« Rien n'arrive sans la permission de Dieu, car c'est lui qui a établi toutes les lois qui régissent l'univers. Demandez donc pourquoi il a fait telle loi plutôt que telle autre. En donnant à l'Esprit la liberté du choix, il lui laisse toute la responsabilité de ses actes et de leurs conséquences ; rien n'entrave son avenir ; la route du bien est à lui comme celle du mal. Mais s'il succombe, il lui reste une consolation, c'est que tout n'est pas fini pour lui, et que Dieu, dans sa bonté, le laisse libre de recommencer ce qu'il a mal fait. Il faut d'ailleurs distinguer ce qui est l'oeuvre de la volonté de Dieu, et ce qui est celle de l'homme. Si un danger vous menace, ce n'est pas vous qui avez créé ce danger, c'est Dieu ; mais vous avez la volonté de vous y exposer, parce que vous y avez vu un moyen d'avancement, et Dieu l'a permis. »

259. Si l'Esprit a le choix du genre d'épreuve qu'il doit subir, s'ensuit-il que toutes les tribulations que nous éprouvons dans la vie ont été prévues et choisies par nous ?

« Toutes n'est pas le mot, car ce n'est pas à dire que vous avez choisi et prévu tout ce qui vous arrive dans le monde, jusque dans les moindres choses ; vous avez choisi le genre d'épreuve, les faits de détail sont la conséquence de la position, et souvent de vos propres actions. Si l'Esprit a voulu naître parmi des malfaiteurs, par exemple, il savait à quels entraînements il s'exposait, mais non chacun des actes qu'il accomplirait ; ces actes sont l'effet de sa volonté ou de son libre arbitre. L'Esprit sait qu'en choisissant telle route il aura tel genre de lutte à subir ; il sait donc la nature des vicissitudes qu'il rencontrera, mais il ne sait pas si ce sera plutôt tel événement que tel autre. Les événements de détail naissent des circonstances et de la force des choses. Il n'y a que les grands événements, ceux qui influent sur la destinée, qui sont prévus. Si tu prends une route remplie d'ornières, tu sais que tu as de grandes précautions à prendre, parce que tu as chance de tomber, mais tu ne sais pas dans quel endroit tu tomberas, et il se peut que tu ne tombes pas, si tu es assez prudent. Si en passant dans la rue il te tombe une tuile sur la tête, ne crois pas que c'était écrit, comme on le dit vulgairement. »

260. Comment l'Esprit peut-il vouloir naître parmi des gens de mauvaise vie ?

« Il faut bien qu'il soit envoyé dans un milieu où il puisse subir l'épreuve qu'il a demandée. Eh bien ! il faut donc qu'il y ait de l'analogie ; pour lutter contre l'instinct du brigandage, il faut qu'il se trouve avec des gens de cette sorte. »

- S'il n'y avait pas des gens de mauvaise vie sur la terre, l'Esprit ne pourrait donc y trouver le milieu nécessaire à certaines épreuves ?

« Est-ce qu'il faudrait s'en plaindre ? C'est ce qui a lieu dans les mondes supérieurs où le mal n'a pas accès ; c'est pourquoi il n'y a que de bons Esprits. Faites qu'il en soit bientôt de même sur votre terre. »

261. L'Esprit, dans les épreuves qu'il doit subir pour arriver à la perfection, doit-il éprouver tous les genres de tentations ; doit-il passer par toutes les circonstances qui peuvent exciter en lui l'orgueil, la jalousie, l'avarice, la sensualité, etc. ?

« Certainement non, puisque vous savez qu'il y en a qui prennent, dès le début, une route qui les affranchit de bien des épreuves ; mais celui qui se laisse entraîner dans la mauvaise route, court tous les dangers de cette route. Un Esprit, par exemple, peut demander la richesse, et cela peut lui être accordé ; alors, suivant son caractère, il pourra devenir avare ou prodigue, égoïste ou généreux, ou bien il se livrera à toutes les jouissances de la sensualité ; mais ce n'est pas à dire qu'il devra passer forcément par la filière de tous ces penchants. »

262. Comment l'Esprit qui, à son origine, est simple, ignorant et sans expérience, peut-il choisir une existence en connaissance de cause, et être responsable de ce choix ?

« Dieu supplée à son inexpérience en lui traçant la route qu'il doit suivre, comme tu le fais pour un enfant dès le berceau ; mais il le laisse peu à peu maître de choisir à mesure que son libre arbitre se développe, et c'est alors que souvent il se fourvoie en prenant le mauvais chemin s'il n'écoute pas les conseils des bons Esprits ; c'est là ce qu'on peut appeler la chute de l'homme. »

- Lorsque l'Esprit jouit de son libre arbitre, le choix de l'existence corporelle dépend-il toujours exclusivement de sa volonté, ou bien cette existence peut-elle lui être imposée par la volonté de Dieu comme expiation ?

« Dieu sait attendre : il ne hâte pas l'expiation ; cependant, Dieu peut imposer une existence à un Esprit, lorsque celui-ci, par son infériorité ou son mauvais vouloir, n'est pas apte à comprendre ce qui pourrait lui être le plus salutaire, et lorsqu'il voit que cette existence peut servir à sa purification et à son avancement, en même temps qu'il y trouve une expiation. »

263. L'Esprit fait-il son choix immédiatement après la mort ?

« Non, plusieurs croient à l'éternité des peines ; on vous l'a dit : c'est un châtiment. »

264. Qu'est-ce qui dirige l'Esprit dans le choix des épreuves qu'il veut subir ?

« Il choisit celles qui peuvent être pour lui une expiation, par la nature de ses fautes, et le faire avancer plus vite. Les uns peuvent donc s'imposer une vie de misère et de privations pour essayer de la supporter avec courage ; d'autres vouloir s'éprouver par les tentations de la fortune et de la puissance, bien plus dangereuses par l'abus et le mauvais usage que l'on en peut faire, et par les mauvaises passions qu'elles développent ; d'autres, enfin, veulent s'éprouver par les luttes qu'ils ont à soutenir dans le contact du vice. »

265. Si certains Esprits choisissent le contact du vice comme épreuve, y en a-t-il qui le choisissent par sympathie et par le désir de vivre dans un milieu conforme à leurs goûts, ou pour pouvoir se livrer matériellement à des penchants matériels ?

« Il y en a, cela est certain, mais ce n'est que chez ceux dont le sens moral est encore peu développé ; l'épreuve vient d'elle-même et ils la subissent plus longtemps. Tôt ou tard, ils comprennent que l'assouvissement des passions brutales a pour eux des conséquences déplorables qu'ils subiront pendant un temps qui leur semblera éternel ; et Dieu pourra les laisser dans cet état, jusqu'à ce qu'ils aient compris leur faute, et qu'ils demandent eux-mêmes à la racheter par des épreuves profitables. »

266. Ne semble-t-il pas naturel de choisir les épreuves les moins pénibles ?

« Pour vous, oui ; pour l'Esprit, non ; lorsqu'il est dégagé de la matière, l'illusion cesse, et il pense autrement. »

L'homme, sur la terre, et placé sous l'influence des idées charnelles, ne voit dans ces épreuves que le côté pénible ; c'est pourquoi il lui semble naturel de choisir celles qui, à son point de vue, peuvent s'allier aux jouissances matérielles ; mais dans la vie spirituelle, il compare ces jouissances fugitives et grossières avec la félicité inaltérable qu'il entrevoit, et dès lors que lui font quelques souffrances passagères ? L'Esprit peut donc choisir l'épreuve la plus rude, et par conséquent l'existence la plus pénible dans l'espoir d'arriver plus vite à un état meilleur, comme le malade choisit souvent le remède le plus désagréable pour se guérir plus tôt. Celui qui veut attacher son nom à la découverte d'un pays inconnu ne choisit pas une route fleurie ; il sait les dangers qu'il court, mais il sait aussi la gloire qui l'attend s'il réussit.

La doctrine de la liberté dans le choix de nos existences et des épreuves que nous devons subir cesse de paraître extraordinaire si l'on considère que les Esprits, dégagés de la matière, apprécient les choses d'une manière différente que nous ne le faisons nous-mêmes. Ils aperçoivent le but, bien autrement sérieux pour eux que les jouissances fugitives du monde ; après chaque existence, ils voient le pas qu'ils ont fait, et comprennent ce qui leur manque encore en pureté pour l'atteindre : voilà pourquoi ils se soumettent volontairement à toutes les vicissitudes de la vie corporelle en demandant eux-mêmes celles qui peuvent les faire arriver le plus promptement. C'est donc à tort que l'on s'étonne de ne pas voir l'Esprit donner la préférence à l'existence la plus douce. Cette vie exempte d'amertume, il ne peut en jouir dans son état d'imperfection ; il l'entrevoit, et c'est pour y arriver qu'il cherche à s'améliorer.

N'avons-nous pas, d'ailleurs, tous les jours sous les yeux l'exemple de choix pareils ? L'homme qui travaille une partie de sa vie sans trêve ni relâche pour amasser de quoi se procurer le bien-être, qu'est-ce que c'est, sinon une tâche qu'il s'impose en vue d'un avenir meilleur ? Le militaire qui s'offre pour une mission périlleuse, le voyageur qui brave les dangers non moins grands dans l'intérêt de la science ou de sa fortune, qu'est-ce que c'est encore, sinon des épreuves volontaires qui doivent leur procurer honneur et profit s'ils en reviennent ? A quoi l'homme ne se soumet-il pas et ne s'expose-t-il pas pour son intérêt ou pour sa gloire ? Tous les concours ne sont-ils pas aussi des épreuves volontaires auxquelles on se soumet en vue de s'élever dans la carrière que l'on a choisie ? On n'arrive à une position sociale transcendante quelconque dans les sciences, les arts, l'industrie, qu'en passant par la filière des positions inférieures qui sont autant d'épreuves. La vie humaine est ainsi le calque de la vie spirituelle ; nous y retrouvons en petit toutes les mêmes péripéties. Si donc, dans la vie, nous choisissons souvent les épreuves les plus rudes en vue d'un but plus élevé, pourquoi l'Esprit qui voit plus loin que le corps, et pour qui la vie du corps n'est qu'un incident fugitif, ne ferait-il pas choix d'une existence pénible et laborieuse, si elle doit le conduire à une éternelle félicité ? Ceux qui disent que, si l'homme a le choix de son existence, ils demanderont à être princes ou millionnaires, sont comme les myopes qui ne voient que ce qu'ils touchent, ou comme ces enfants gourmands à qui l'on demande l'état qu'ils préfèrent, et qui répondent : pâtissier ou confiseur.

Tel est le voyageur qui, dans le fond de la vallée obscurcie par le brouillard, ne voit ni la longueur ni les points extrêmes de sa route ; arrivé au faîte de la montagne, il embrasse le chemin qu'il a parcouru, et ce qui lui reste à parcourir ; il voit son but, les obstacles qu'il a encore à franchir, et peut alors combiner plus sûrement les moyens d'arriver. L'Esprit incarné est comme le voyageur au bas de la montagne ; débarrassé des liens terrestres, il domine comme celui qui est au sommet. Pour le voyageur, le but est le repos après la fatigue ; pour l'Esprit, c'est le bonheur suprême après les tribulations et les épreuves.

Tous les Esprits disent qu'à l'état errant ils cherchent, étudient, observent pour faire leur choix. N'avons-nous pas un exemple de ce fait dans la vie corporelle ? Ne cherchons-nous pas souvent pendant des années la carrière sur laquelle nous fixons librement notre choix, parce que nous la croyons la plus propre à nous faire faire notre chemin ? Si nous échouons dans l'une, nous en cherchons une autre. Chaque carrière que nous embrassons est une phase, une période de la vie. Chaque jour n'est-il pas employé à chercher ce que nous ferons le lendemain ? Or, que sont les différentes existences corporelles pour l'Esprit, sinon des phases, des périodes, des jours pour sa vie spirite, qui est, comme nous le savons, sa vie normale, la vie corporelle n'étant que transitoire et passagère ?

267. L'Esprit pourrait-il faire son choix pendant l'état corporel ?

« Son désir peut avoir de l'influence ; cela dépend de l'intention ; mais quand il est Esprit il voit souvent les choses bien différemment. Ce n'est que l'Esprit qui fait ce choix ; mais encore une fois il peut le faire dans cette vie matérielle, car l'Esprit a toujours de ces moments où il est indépendant de la matière qu'il habite. »

- Beaucoup de gens désirent les grandeurs et les richesses, et ce n'est assurément ni comme expiation, ni comme épreuve ?

« Sans doute, c'est la matière qui désire cette grandeur pour en jouir, et c'est l'Esprit qui la désire pour en connaître les vicissitudes. »

268. Jusqu'à ce qu'il arrive à l'état de pureté parfaite, l'Esprit a-t-il constamment des épreuves à subir ?

« Oui, mais elles ne sont pas telles que vous l'entendez ; vous appelez épreuves les tribulations matérielles ; or, l'Esprit, arrivé à un certain degré, sans être parfait, n'en a plus à subir ; mais il a toujours des devoirs qui l'aident à se perfectionner, et n'ont rien de pénible pour lui, ne fût-ce que d'aider aux autres à se perfectionner eux-mêmes. »

269. L'Esprit peut-il se tromper sur l'efficacité de l'épreuve qu'il choisit ?

« Il peut en choisir une qui soit au-dessus de ses forces, et alors il succombe ; il peut aussi en choisir une qui ne lui profite nullement, comme s'il cherche un genre de vie oisive et inutile ; mais alors, une fois rentré dans le monde des Esprits, il s'aperçoit qu'il n'a rien gagné et il demande à réparer le temps perdu. »

270. A quoi tiennent les vocations de certaines personnes, et leur volonté de suivre une carrière plutôt qu'une autre ?

« Il me semble que vous pouvez répondre vous-mêmes à cette question. N'est-ce pas la conséquence de tout ce que nous avons dit sur le choix des épreuves et sur le progrès accompli dans une existence antérieure ? »

271. Dans l'état errant, l'Esprit étudiant les diverses conditions dans lesquelles il pourra progresser, comment pense-t-il pouvoir le faire en naissant, par exemple, parmi les peuples cannibales ?

« Ce ne sont pas les Esprits déjà avancés qui naissent parmi les cannibales, mais des Esprits de la nature de ceux des cannibales ou qui leur sont inférieurs. »

Nous savons que nos anthropophages ne sont pas au dernier degré de l'échelle, et qu'il y a des mondes où l'abrutissement et la férocité n'ont pas d'analogue sur la terre. Ces Esprits sont donc encore inférieurs aux plus inférieurs de notre monde, et venir parmi nos sauvages, c'est pour eux un progrès, comme ce serait un progrès pour nos anthropophages d'exercer parmi nous une profession qui les obligerait à verser le sang. S'ils ne visent pas plus haut, c'est que leur infériorité morale ne leur permet pas de comprendre un progrès plus complet. L'Esprit ne peut avancer que graduellement ; il ne peut franchir d'un bond la distance qui sépare la barbarie de la civilisation, et c'est en cela que nous voyons une des nécessités de la réincarnation, qui est bien véritablement selon la justice de Dieu ; autrement, que deviendraient ces millions d'êtres qui meurent chaque jour dans le dernier état de dégradation, s'ils n'avaient les moyens d'atteindre à la supériorité ? Pourquoi Dieu les aurait-il déshérités des faveurs accordées aux autres hommes ?

272. Des Esprits venant d'un monde inférieur à la terre, ou d'un peuple très arriéré, comme les cannibales, par exemple, pourraient-ils naître parmi nos peuples civilisés ?

« Oui, il y en a qui se fourvoient en voulant monter trop haut ; mais alors ils sont déplacés parmi vous, parce qu'ils ont des moeurs et des instincts qui jurent avec les vôtres. »

Ces êtres nous donnent le triste spectacle de la férocité au milieu de la civilisation ; en retournant parmi les cannibales, ce ne sera pas une déchéance, ils ne feront que reprendre leur place et ils y gagneront peut-être encore.

273. Un homme appartenant à une race civilisée pourrait-il, par expiation, être réincarné dans une race sauvage ?

« Oui, mais cela dépend du genre d'expiation ; un maître qui aura été dur pour ses esclaves pourra devenir esclave à son tour et subir les mauvais traitements qu'il aura fait endurer. Celui qui a commandé à une époque peut, dans une nouvelle existence, obéir à ceux-là mêmes qui se courbaient sous sa volonté. C'est une expiation s'il a abusé de son pouvoir, et Dieu peut la lui imposer. Un bon Esprit peut aussi, pour les faire avancer, choisir une existence influente parmi ces peuples, et alors c'est une mission. »

Relations d'outre-tombe.

274. Les différents ordres d'Esprits établissent-ils entre ceux-ci une hiérarchie de pouvoirs ; y a-t-il parmi eux subordination et autorité ?
« Oui, très grande ; les Esprits ont les uns sur les autres une autorité relative à leur supériorité, et qu'ils exercent par un ascendant moral irrésistible. »

- Les Esprits inférieurs peuvent-ils se soustraire à l'autorité de ceux qui leur sont supérieurs ?

« J'ai dit : irrésistible. »

275. La puissance et la considération dont un homme a joui sur la terre lui donnent-elles une suprématie dans le monde des Esprits ?

« Non ; car les petits seront élevés et les grands abaissés. Lis les psaumes. »

- Comment devons-nous entendre cette élévation et cet abaissement ?

« Ne sais-tu pas que les Esprits sont de différents ordres selon leur mérite ? Eh bien ! le plus grand de la terre peut être au dernier rang parmi les Esprits, tandis que son serviteur sera au premier. Comprends-tu cela ? Jésus n'a-t-il pas dit : Quiconque s'abaisse sera élevé, et quiconque s'élève sera abaissé ? »

276. Celui qui a été grand sur la terre et qui se trouve inférieur parmi les Esprits, en éprouve-t-il de l'humiliation ?

« Souvent une bien grande, surtout s'il était orgueilleux et jaloux. »

277. Le soldat qui, après la bataille, retrouve son général dans le monde des Esprits, le reconnaît-il encore pour son supérieur ?

« Le titre n'est rien, la supériorité réelle est tout. »

278. Les Esprits des différents ordres sont-ils confondus ?

« Oui et non ; c'est-à-dire qu'ils se voient, mais ils se distinguent les uns des autres. Ils se fuient ou se rapprochent, selon l'analogie ou l'antipathie de leurs sentiments, comme cela a lieu parmi vous. C'est tout un monde dont le vôtre est le reflet obscurci. Ceux du même rang se réunissent par une sorte d'affinité et forment des groupes ou familles d'Esprits unis par la sympathie et le but qu'ils se proposent : les bons par le désir de faire le bien, les mauvais par le désir de faire le mal, la honte de leurs fautes et le besoin de se trouver parmi des êtres semblables à eux. »

Telle une grande cité où les hommes de tous rangs et de toutes conditions se voient et se rencontrent sans se confondre ; où les sociétés se forment par l'analogie des goûts ; où le vice et la vertu se coudoient sans se rien dire.

279. Tous les Esprits ont-ils réciproquement accès les uns parmi les autres ?

« Les bons vont partout, et il faut qu'il en soit ainsi pour qu'ils puissent exercer leur influence sur les mauvais ; mais les régions habitées par les bons sont interdites aux Esprits imparfaits, afin que ceux-ci ne puissent y apporter le trouble des mauvaises passions. »

280. Quelle est la nature des relations entre les bons et les mauvais Esprits ?

« Les bons tâchent de combattre les mauvais penchants des autres afin de les aider à monter ; c'est une mission. »

281. Pourquoi les Esprits inférieurs se plaisent-ils à nous porter au mal ?

« Par jalousie de n'avoir pas mérité d'être parmi les bons. Leur désir est d'empêcher autant qu'il est en eux les Esprits encore inexpérimentés d'arriver au bien suprême ; ils veulent faire éprouver aux autres ce qu'ils éprouvent eux-mêmes. Ne voyez-vous pas aussi cela parmi vous ? »

282. Comment les Esprits se communiquent-ils entre eux ?

« Ils se voient et se comprennent ; la parole est matérielle : c'est le reflet de l'Esprit. Le fluide universel établit entre eux une communication constante ; c'est le véhicule de la transmission de la pensée, comme pour vous l'air est le véhicule du son ; une sorte de télégraphe universel qui relie tous les mondes, et permet aux Esprits de correspondre d'un monde à l'autre. »

283. Les Esprits peuvent-ils se dissimuler réciproquement leurs pensées ; peuvent-ils se cacher les uns des autres ?

« Non, pour eux tout est à découvert, surtout lorsqu'ils sont parfaits. Ils peuvent s'éloigner, mais ils se voient toujours. Ceci n'est point cependant une règle absolue, car certains Esprits peuvent très bien se rendre invisibles pour d'autres Esprits, s'ils jugent utile de le faire. »

284. Comment les Esprits, qui n'ont plus de corps, peuvent-ils constater leur individualité et se distinguer des autres êtres spirituels qui les entourent ?

« Ils constatent leur individualité par le périsprit qui en fait des êtres distincts les uns pour les autres, comme le corps parmi les hommes. »

285. Les Esprits se reconnaissent-ils pour avoir cohabité la terre ? Le fils reconnaît-il son père, l'ami son ami ?

« Oui, et ainsi de génération en génération. »

- Comment les hommes qui se sont connus sur terre se reconnaissent-ils dans le monde des Esprits ?

« Nous voyons notre vie passée et nous y lisons comme dans un livre ; en voyant le passé de nos amis et de nos ennemis nous voyons leur passage de la vie à la mort. »

286. L'âme, en quittant sa dépouille mortelle, voit-elle immédiatement ses parents et ses amis qui l'ont précédée dans le monde des Esprits ?

« Immédiatement n'est pas toujours le mot ; car, comme nous l'avons dit, il lui faut quelque temps pour se reconnaître et secouer le voile matériel. »

287. Comment l'âme est-elle accueillie à son retour dans le monde des Esprits ?

« Celle du juste, comme un frère bien-aimé attendu depuis longtemps ; celle du méchant, comme un être que l'on méprise. »

288. Quel sentiment éprouvent les Esprits impurs à la vue d'un autre mauvais Esprit qui leur arrive ?

« Les méchants sont satisfaits de voir des êtres à leur image et privés, comme eux, du bonheur infini, comme l'est, sur la terre, un fripon parmi ses pareils. »

289. Nos parents et nos amis viennent-ils quelquefois à notre rencontre quand nous quittons la terre ?

« Oui, ils viennent au-devant de l'âme qu'ils affectionnent ; ils la félicitent comme au retour d'un voyage, si elle a échappé aux dangers de la route, et l'aident à se dégager des liens corporels. C'est une faveur pour les bons Esprits quand ceux qui les ont affectionnés viennent à leur rencontre, tandis que celui qui est souillé reste dans l'isolement, ou n'est entouré que d'Esprits semblables à lui : c'est une punition. »

290. Les parents et les amis sont-ils toujours réunis après leur mort ?

« Cela dépend de leur élévation et de la route qu'ils suivent pour leur avancement. Si l'un d'eux est plus avancé et marche plus vite que l'autre, ils ne pourront rester ensemble ; ils pourront se voir quelquefois, mais ils ne seront pour toujours réunis que quand ils pourront marcher de front, ou quand ils auront atteint l'égalité dans la perfection. Et puis, la privation de la vue de ses parents et de ses amis est quelquefois une punition. »

Rapports sympathiques et antipathiques des Esprits. 
Moitiés éternelles.

291. Outre la sympathie générale de similitude, les Esprits ont-ils entre eux des affections particulières ?
« Oui, comme les hommes ; mais le lien qui unit les Esprits est plus fort quand le corps est absent, parce qu'il n'est plus exposé aux vicissitudes des passions. »

292. Les Esprits ont-ils entre eux des haines ?

« Il n'y a de haines que parmi les Esprits impurs, et ce sont ceux qui soufflent parmi vous les inimitiés et les dissensions. »

293. Deux êtres qui auront été ennemis sur terre conserveront-ils du ressentiment l'un contre l'autre dans le monde des Esprits ?

« Non, ils comprendront que leur haine était stupide et le sujet puéril. Les Esprits imparfaits conservent seuls une sorte d'animosité jusqu'à ce qu'ils se soient épurés. Si ce n'est qu'un intérêt matériel qui les a divisés, ils n'y songeront plus, pour peu qu'ils soient dématérialisés. S'il n'y a pas antipathie entre eux, le sujet de discussion n'existant plus, ils peuvent se revoir avec plaisir. »

Tels deux écoliers parvenus à l'âge de raison, reconnaissent la puérilité des querelles qu'ils ont eues dans leur enfance et cessent de s'en vouloir.

294. Le souvenir des mauvaises actions que deux hommes ont pu commettre à l'égard l'un de l'autre est-il un obstacle à leur sympathie ?

« Oui, il les porte à s'éloigner. »

295. Quel sentiment éprouvent après la mort ceux à qui nous avons fait du mal ici-bas ?

« S'ils sont bons, ils pardonnent selon votre repentir. S'ils sont mauvais, ils peuvent en conserver du ressentiment, et quelquefois vous poursuivre jusque dans une autre existence. Dieu peut le permettre comme châtiment. »

296. Les affections individuelles des Esprits sont elles susceptibles d'altération ?

« Non, car ils ne peuvent se tromper ; ils n'ont plus le masque sous lequel se cachent les hypocrites ; c'est pourquoi leurs affections sont inaltérables quand ils sont purs. L'amour qui les unit est pour eux la source d'une suprême félicité. »

297. L'affection que deux êtres se sont portée sur la terre se continue-t-elle toujours dans le monde des Esprits ?

« Oui, sans doute, si elle est fondée sur une sympathie véritable ; mais si les causes physiques y ont plus de part que la sympathie, elle cesse avec la cause. Les affections parmi les Esprits sont plus solides et plus durables que sur la terre, parce qu'elles ne sont point subordonnées au caprice des intérêts matériels et de l'amour-propre. »

298. Les âmes qui doivent s'unir sont-elles prédestinées à cette union dès leur origine, et chacun de nous a-t-il quelque part dans l'univers sa moitié à laquelle il sera un jour fatalement réuni ?

« Non ; il n'existe pas d'union particulière et fatale entre deux âmes. L'union existe entre tous les Esprits, mais à des degrés différents selon le rang qu'ils occupent, c'est-à-dire selon la perfection qu'ils ont acquise : plus ils sont parfaits, plus ils sont unis. De la discorde naissent tous les maux des humains ; de la concorde résulte le bonheur complet. »

299. Dans quel sens doit-on entendre le mot moitié dont certains Esprits se servent pour désigner les Esprits sympathiques ?

« L'expression est inexacte ; si un Esprit était la moitié d'un autre, séparé de celui-ci, il serait incomplet. »

300. Deux Esprits parfaitement sympathiques, une fois réunis, le sont-ils pour l'éternité, ou bien peuvent-ils se séparer et s'unir à d'autres Esprits ?

« Tous les Esprits sont unis entre eux ; je parle de ceux arrivés à la perfection. Dans les sphères inférieures, lorsqu'un Esprit s'élève, il n'a plus la même sympathie pour ceux qu'il a quittés. »

301. Deux Esprits sympathiques sont-ils le complément l'un de l'autre, ou bien cette sympathie est-elle le résultat d'une identité parfaite ?

« La sympathie qui attire un Esprit vers un autre est le résultat de la parfaite concordance de leurs penchants, de leurs instincts ; si l'un devait compléter l'autre, il perdrait son individualité. »

302. L'identité nécessaire pour la sympathie parfaite ne consiste-t-elle que dans la similitude de pensées et de sentiments, ou bien encore dans l'uniformité des connaissances acquises ?

« Dans l'égalité des degrés d'élévation. »

303. Les Esprits qui ne sont pas sympathiques aujourd'hui, peuvent-ils le devenir plus tard ?

« Oui, tous le seront. Ainsi l'Esprit qui est aujourd'hui dans telle sphère inférieure, en se perfectionnant parviendra dans la sphère ou réside tel autre. Leur rencontre aura lieu plus promptement, si l'Esprit plus élevé, supportant mal les épreuves auxquelles il s'est soumis, est demeuré dans le même état. »

- Deux Esprits sympathiques peuvent-ils cesser de l'être ?

« Certes, si l'un est paresseux. »

La théorie des moitiés éternelles est une figure qui peint l'union de deux Esprits sympathiques ; c'est une expression usitée même dans le langage vulgaire et qu'il ne faut point prendre à la lettre ; les Esprits qui s'en sont servis n'appartiennent assurément point à l'ordre le plus élevé ; la sphère de leurs idées est nécessairement bornée, et ils ont pu rendre leurs pensées par les termes dont ils se seraient servis pendant leur vie corporelle. Il faut donc rejeter cette idée que deux Esprits créés l'un pour l'autre doivent un jour fatalement se réunir dans l'éternité, après avoir été séparés pendant un laps de temps plus ou moins long.

Souvenir de l'existence corporelle.

304. L'Esprit se souvient-il de son existence corporelle ?
« Oui, c'est-à-dire qu'ayant vécu plusieurs fois comme homme, il se rappelle ce qu'il a été, et je t'assure que, parfois, il rit de pitié de lui-même. »

Comme l'homme qui a atteint l'âge de raison rit des folies de sa jeunesse ou des puérilités de son enfance.

305. Le souvenir de l'existence corporelle se présente-t-il à l'Esprit d'une manière complète et inopinée après la mort ?

« Non, il lui revient peu à peu, comme quelque chose qui sort du brouillard, et à mesure qu'il y fixe son attention. »

306. L'Esprit se souvient-il, en détail, de tous les événements de sa vie ; en embrasse-t-il l'ensemble d'un coup d'oeil rétrospectif ?

« Il se souvient des choses en raison des conséquences qu'elles ont sur son état d'Esprit ; mais tu conçois qu'il y a des circonstances de sa vie auxquelles il n'attache aucune importance, et dont il ne cherche même pas à se souvenir. »

- Pourrait-il s'en souvenir s'il le voulait ?

« Il peut se souvenir des détails et des incidents les plus minutieux, soit des événements, soit même de ses pensées ; mais quand c'est sans utilité il ne le fait pas. »

- Entrevoit-il le but de la vie terrestre par rapport à la vie future ?

« Assurément il le voit et le comprend bien mieux que du vivant de son corps ; il comprend le besoin d'épuration pour arriver à l'infini, et il sait qu'à chaque existence il laisse quelques impuretés. »

307. Comment la vie passée se retrace-t-elle à la mémoire de l'Esprit ? Est-ce par un effort de son imagination ou comme un tableau qu'il a devant les yeux ?

« L'un et l'autre ; tous les actes dont il a intérêt à se souvenir sont pour lui comme s'ils étaient présents ; les autres sont plus ou moins dans le vague de la pensée, ou tout à fait oubliés. Plus il est dématérialisé, moins il attache d'importance aux choses matérielles. Tu fais souvent l'évocation d'un Esprit errant qui vient de quitter la terre et qui ne se rappelle pas les noms des personnes qu'il aimait, ni bien des détails qui, pour toi, paraissent importants ; il s'en soucie peu et cela tombe dans l'oubli. Ce dont il se rappelle très bien, ce sont les faits principaux qui l'aident à s'améliorer. »

308. L'Esprit se souvient-il de toutes les existences qui ont précédé la dernière qu'il vient de quitter ?

« Tout son passé se déroule devant lui, comme les étapes qu'a parcourues le voyageur ; mais, nous l'avons dit, il ne se souvient pas d'une manière absolue de tous les actes ; il s'en souvient en raison de l'influence qu'ils ont sur son état présent. Quant aux premières existences, celles qu'on peut regarder comme l'enfance de l'Esprit, elles se perdent dans le vague et disparaissent dans la nuit de l'oubli. »

309. Comment l'Esprit considère-t-il le corps qu'il vient de quitter ?

« Comme un mauvais habit qui le gênait et dont il est heureux d'être débarrassé. »

- Quel sentiment lui fait éprouver la vue de son corps en décomposition ?

« Presque toujours de l'indifférence, comme pour une chose à laquelle il ne tient plus. »

310. Au bout d'un certain laps de temps, l'Esprit reconnaît-il des ossements ou autres objets comme lui ayant appartenu ?

« Quelquefois ; cela dépend du point de vue plus ou moins élevé sous lequel il considère les choses terrestres. »

311. Le respect que l'on a pour les choses matérielles qui restent de l'Esprit attire-t-il son attention sur ces mêmes objets, et voit-il ce respect avec plaisir ?

« L'Esprit est toujours heureux du souvenir qu'on a de lui ; les choses que l'on conserve de lui le rappellent à la mémoire, mais c'est la pensée qui l'attire vers vous, et non ces objets. »

312. Les Esprits conservent-ils le souvenir des souffrances qu'ils ont endurées pendant leur dernière existence corporelle ?

« Souvent ils le conservent, et ce souvenir leur fait mieux sentir le prix de la félicité dont ils peuvent jouir comme Esprits. »

313. L'homme qui a été heureux ici-bas regrette-t-il ses jouissances quand il a quitté la terre ?

« Les Esprits inférieurs seuls peuvent regretter des joies qui sympathisent avec l'impureté de leur nature et qu'ils expient par leurs souffrances. Pour les Esprits élevés, le bonheur éternel est mille fois préférable aux plaisirs éphémères de la terre. »

Tel l'homme adulte qui méprise ce qui faisait les délices de son enfance.

314. Celui qui a commencé de grands travaux dans un but utile, et qu'il voit interrompus par la mort, regrette-t-il, dans l'autre monde, de les avoir laissés inachevés ?

« Non, parce qu'il voit que d'autres sont destinés à les terminer. Au contraire, il tâche d'influencer d'autres Esprits humains à les continuer. Son but, sur la terre, était le bien de l'humanité ; ce but est le même dans le monde des Esprits. »

315. Celui qui a laissé des travaux d'art ou de littérature conserve-t-il pour ses oeuvres l'amour qu'il avait de son vivant ?

« Selon son élévation, il les juge à un autre point de vue, et souvent il blâme ce qu'il admirait le plus. »

316. L'Esprit s'intéresse-t-il encore aux travaux qui se font sur la terre, au progrès des arts et des sciences ?

« Cela dépend de son élévation ou de la mission qu'il peut avoir à remplir. Ce qui vous paraît magnifique est souvent bien peu de choses pour certains Esprits ; ils l'admirent, comme le savant admire l'ouvrage d'un écolier. Il examine ce qui peut prouver l'élévation des Esprits incarnés et leurs progrès. »

317. Les Esprits, après la mort, conservent-ils l'amour de la patrie ?

« C'est toujours le même principe : pour les Esprits élevés la patrie c'est l'univers ; sur la terre, elle est où ils ont le plus de personnes sympathiques. »

La situation des Esprits et leur manière de voir les choses varient à l'infini en raison du degré de leur développement moral et intellectuel. Les Esprits d'un ordre élevé ne font généralement sur la terre que des séjours de courte durée ; tout ce qui s'y fait est si mesquin en comparaison des grandeurs de l'infini, les choses auxquelles les hommes attachent le plus d'importance sont si puériles à leurs yeux, qu'ils y trouvent peu d'attraits, à moins qu'ils n'y soient appelés en vue de concourir au progrès de l'humanité. Les Esprits d'un ordre moyen y séjournent plus fréquemment, quoiqu'ils considèrent les choses d'un point de vue plus élevé que de leur vivant. Les Esprits vulgaires y sont en quelque sorte sédentaires, et constituent la masse de la population ambiante du monde invisible ; ils ont conservé à peu de chose près les mêmes idées, les mêmes goûts et les mêmes penchants qu'ils avaient sous leur enveloppe corporelle ; ils se mêlent à nos réunions, à nos affaires, à nos amusements, auxquels ils prennent une part plus ou moins active, selon leur caractère. Ne pouvant satisfaire leurs passions, ils jouissent de ceux qui s'y abandonnent et les y excitent. Dans le nombre, il en est de plus sérieux qui voient et observent pour s'instruire et se perfectionner.

318. Les idées des Esprits se modifient-elles dans l'état d'esprit ?

« Beaucoup ; elles subissent de très grandes modifications à mesure que l'Esprit se dématérialise ; il peut quelquefois rester longtemps dans les mêmes idées, mais peu à peu l'influence de la matière diminue, et il voit les choses plus clairement ; c'est alors qu'il cherche les moyens de s'améliorer. »

319. Puisque l'Esprit a déjà vécu de la vie spirite avant son incarnation, d'où vient son étonnement en rentrant dans le monde des Esprits ?

« Ce n'est que l'effet du premier moment et du trouble qui suit le réveil ; plus tard il se reconnaît parfaitement à mesure que le souvenir du passé lui revient, et que s'efface l'impression de la vie terrestre. » (163 et suiv.)

Commémoration des morts. Funérailles.

320. Les Esprits sont-ils sensibles au souvenir de ceux qu'ils ont aimés sur la terre ?
« Beaucoup plus que vous ne pouvez le croire ; ce souvenir ajoute à leur bonheur s'ils sont heureux ; et s'ils sont malheureux, il est pour eux un adoucissement. »

321. Le jour de la commémoration des morts a-t-il quelque chose de plus solennel pour les Esprits ? Se préparent-ils à venir visiter ceux qui doivent aller prier sur leurs dépouilles ?

« Les Esprits viennent à l'appel de la pensée ce jour-là comme les autres jours. »

- Ce jour est-il pour eux un rendez-vous auprès de leurs sépultures ?

« Ils y sont plus nombreux ce jour-là, parce qu'il y a plus de personnes qui les appellent ; mais chacun d'eux n'y vient que pour ses amis, et non pour la foule des indifférents. »

- Sous quelle forme y viennent-ils et comment les verrait-on s'ils pouvaient se rendre visibles ?

« Celle sous laquelle on les a connus de leur vivant. »

322. Les Esprits oubliés et dont personne ne va visiter les tombes y viennent-ils malgré cela, et éprouvent-ils un regret de ne voir aucun ami se rappeler à leur mémoire ?

« Que leur fait la terre ? On n'y tient que par le coeur. Si l'amour n'y est pas, il n'y a plus rien qui y rattache l'Esprit : il a tout l'univers à lui. »

323. La visite au tombeau procure-t-elle plus de satisfaction à l'Esprit qu'une prière faite chez soi ?

« La visite au tombeau est une manière de manifester qu'on pense à l'Esprit absent : c'est l'image. Je vous l'ai dit, c'est la prière qui sanctifie l'acte du souvenir ; peu importe le lieu, si elle est dite par le coeur. »

324. Les Esprits des personnes auxquelles on élève des statues ou des monuments assistent-ils à ces sortes d'inauguration, et les voient-ils avec plaisir ?

« Beaucoup y viennent lorsqu'ils le peuvent, mais ils sont moins sensibles à l'honneur qu'on leur fait qu'au souvenir. »

325. D'où peut venir à certaines personnes le désir d'être enterrées dans un endroit plutôt que dans un autre ? Y reviennent-elles plus volontiers après leur mort ; et cette importance attachée à une chose matérielle est-elle un signe d'infériorité chez l'Esprit ?

« Affection de l'Esprit pour certains lieux ; infériorité morale. Que fait un coin de terre plutôt qu'un autre pour l'Esprit élevé ? Ne sait-il pas que son âme sera réunie à ceux qu'il aime, quand même leurs os sont séparés ?

- La réunion des dépouilles mortelles de tous les membres d'une même famille doit-elle être considérée comme une chose futile ?

« Non ; c'est un pieux usage et un témoignage de sympathie pour ceux que l'on a aimés ; si cette réunion importe peu aux Esprits, elle est utile aux hommes : les souvenirs sont plus recueillis. »

326. L'âme, rentrant dans la vie spirituelle, est-elle sensible aux honneurs rendus à sa dépouille mortelle ?

« Quand l'Esprit est arrivé déjà à un certain degré de perfection, il n'a plus de vanité terrestre et comprend la futilité de toutes ces choses ; mais sache bien souvent il y a des Esprits qui, au premier moment de leur mort matérielle, goûtent un grand plaisir des honneurs qu'on leur rend, ou un ennui du délaissement de leur enveloppe ; car ils conservent encore quelques-uns des préjugés d'ici-bas. »

327. L'Esprit assiste-t-il à son convoi ?

« Très souvent il y assiste, mais quelquefois il ne se rend pas compte de ce qui s'y passe, s'il est encore dans le trouble. »

- Est-il flatté du concours des assistants à son convoi ?

« Plus ou moins selon le sentiment qui les amène. »

328. L'Esprit de celui qui vient de mourir assiste-t-il aux réunions de ses héritiers ?

« Presque toujours ; Dieu le veut pour sa propre instruction et le châtiment des coupables ; c'est là qu'il juge ce que valaient leurs protestations ; pour lui tous les sentiments sont à découvert, et la déception qu'il éprouve en voyant la rapacité de ceux qui se partagent ses dépouilles l'éclaire sur leurs sentiments ; mais leur tour viendra. »

329. Le respect instinctif que l'homme, dans tous les temps et chez tous les peuples, témoigne pour les morts est-il un effet de l'intuition qu'il a de l'existence future ?

« C'en est la conséquence naturelle ; sans cela ce respect serait sans objet. »

CHAPITRE VII
RETOUR A LA VIE CORPORELLE

1. Préludes du retour. - 2. Union de l'âme et du corps. Avortement.


3. Facultés morales et intellectuelles de l'homme. - 4. Influence de l'organisme.
5. Idiotisme, folie. - 6. De l'enfance. - 7. Sympathies et antipathies terrestres.
8. Oubli du passé.

Préludes du retour.

330. Les Esprits connaissent-ils l'époque à laquelle ils seront réincarnés ?
« Ils la pressentent, comme un aveugle sent le feu dont il s'approche. Ils savent qu'ils doivent reprendre un corps, comme vous savez que vous devez mourir un jour, mais sans savoir quand cela arrivera. » (166).

- La réincarnation est donc une nécessité de la vie spirite, comme la mort est une nécessité de la vie corporelle ?

« Assurément, il en est ainsi. »

331. Tous les Esprits se préoccupent-ils de leur réincarnation ?

« Il en est qui n'y songent nullement, qui même ne la comprennent pas ; cela dépend de leur nature plus ou moins avancée. Pour quelques-uns l'incertitude où ils sont de leur avenir est une punition. »

332. L'Esprit peut-il rapprocher ou retarder le moment de sa réincarnation ?

« Il peut le rapprocher en l'appelant de ses voeux ; il peut aussi l'éloigner s'il recule devant l'épreuve, car parmi les Esprits il y a aussi des lâches et des indifférents, mais il ne le fait pas impunément ; il en souffre comme celui qui recule devant le remède salutaire qui peut le guérir. »

333. Si un Esprit se trouvait assez heureux d'une condition moyenne parmi les Esprits errants, et qu'il n'eût pas l'ambition de monter, pourrait-il prolonger cet état indéfiniment ?

« Non, pas indéfiniment ; l'avancement est un besoin que l'Esprit éprouve tôt ou tard ; tous doivent monter, c'est leur destinée. »

334. L'union de l'âme avec tel ou tel corps est-elle prédestinée, ou bien n'est-ce qu'au dernier moment que le choix se fait ?

« L'Esprit est toujours désigné d'avance. L'Esprit, en choisissant l'épreuve qu'il veut subir, demande à s'incarner ; or Dieu, qui sait tout et voit tout, a su et vu d'avance que telle âme s'unirait à tel corps. »

335. L'Esprit a-t-il le choix du corps dans lequel il doit entrer, ou seulement du genre de vie qui doit lui servir d'épreuve ?

« Il peut aussi choisir le corps, car les imperfections de ce corps sont pour lui des épreuves qui aident à son avancement s'il dompte les obstacles qu'il y rencontre, mais le choix ne dépend pas toujours de lui ; il peut demander. »

- L'Esprit pourrait-il, au dernier moment, refuser d'entrer dans le corps choisi par lui ?

« S'il refusait, il en souffrirait beaucoup plus que celui qui n'aurait tenté aucune épreuve. »

336. Pourrait-il arriver qu'un enfant qui doit naître ne trouvât pas d'Esprit qui voulût s'incarner en lui ?

« Dieu y pourvoirait. L'enfant, lorsqu'il doit naître viable, est toujours prédestiné à avoir une âme ; rien n'a été créé sans dessein. »

337. L'union de l'Esprit avec tel corps peut-elle être imposée par Dieu ?

« Elle peut être imposée, de même que les différentes épreuves, surtout lorsque l'Esprit n'est pas encore apte à faire un choix avec connaissance de cause. Comme expiation, l'Esprit peut être contraint de s'unir au corps de tel enfant qui, par sa naissance et la position qu'il aura dans le monde, pourra devenir pour lui un sujet de châtiment. »

338. S'il arrivait que plusieurs Esprits se présentassent pour un même corps qui doit naître, qu'est-ce qui déciderait entre eux ?

« Plusieurs peuvent le demander ; c'est Dieu qui juge en pareil cas celui qui est le plus capable de remplir la mission à laquelle l'enfant est destiné ; mais, je l'ai dit, l'Esprit est désigné avant l'instant où il doit s'unir au corps. »

339. Le moment de l'incarnation est-il accompagné d'un trouble semblable à celui qui a lieu à la sortie du corps ?

« Beaucoup plus grand et surtout plus long. A la mort, l'Esprit sort de l'esclavage ; à la naissance, il y rentre. »

340. L'instant où un Esprit doit s'incarner est-il pour lui un instant solennel ? Accomplit-il cet acte comme une chose grave et importante pour lui ?

« Il est comme un voyageur qui s'embarque pour une traversée périlleuse, et qui ne sait s'il ne doit pas trouver la mort dans les vagues qu'il affronte. »

Le voyageur qui s'embarque sait à quels périls il s'expose, mais il ne sait s'il fera naufrage ; il en est ainsi de l'Esprit : il connaît le genre des épreuves auxquelles il se soumet, mais il ne sait s'il succombera.

De même que la mort du corps est une sorte de renaissance pour l'Esprit, la réincarnation est pour celui-ci une sorte de mort, ou plutôt d'exil et de claustration. Il quitte le monde des Esprits pour le monde corporel, comme l'homme quitte le monde corporel pour le monde des Esprits. L'Esprit sait qu'il se réincarnera, comme l'homme sait qu'il mourra ; mais, comme celui-ci, il n'en a conscience qu'au dernier moment, quand le temps voulu est arrivé ; alors, à ce moment suprême, le trouble s'empare de lui, comme chez l'homme qui est à l'agonie, et ce trouble persiste jusqu'à ce que la nouvelle existence soit nettement formée. Les approches de la réincarnation sont une sorte d'agonie pour l'Esprit.

341. L'incertitude où se trouve l'Esprit sur l'éventualité du succès des épreuves qu'il va subir dans la vie, est-elle pour lui une cause d'anxiété avant son incarnation ?

« Une anxiété bien grande, puisque les épreuves de son existence le retarderont ou l'avanceront selon qu'il les aura bien ou mal supportées. »

342. Au moment de sa réincarnation, l'Esprit est-il accompagné par d'autres Esprits de ses amis qui viennent assister à son départ du monde spirite, comme ils viennent le recevoir lorsqu'il y rentre ?

« Cela dépend de la sphère que l'Esprit habite. S'il est dans les sphères où règne l'affection, les Esprits qui l'aiment l'accompagnent jusqu'au dernier moment, l'encouragent, et souvent même le suivent dans la vie. »

343. Les Esprits amis qui nous suivent dans la vie sont-ils parfois ceux que nous voyons en songe, qui nous témoignent de l'affection, et qui se présentent à nous sous des traits inconnus ?

« Très souvent ce sont eux ; ils viennent vous visiter, comme vous allez voir un prisonnier sous les verrous. »

Union de l'âme et du corps.

344. A quel moment l'âme s'unit-elle au corps ?
« L'union commence à la conception, mais elle n'est complète qu'au moment de la naissance. Du moment de la conception, l'Esprit désigné pour habiter tel corps y tient par un lien fluidique qui va se resserrant de plus en plus jusqu'à l'instant où l'enfant voit le jour ; le cri qui s'échappe alors de l'enfant annonce qu'il fait nombre parmi les vivants et les serviteurs de Dieu. »

345. L'union entre l'Esprit et le corps est-elle définitive du moment de la conception ? Pendant cette première période, l'Esprit pourrait-il renoncer à habiter le corps désigné ?

« L'union est définitive, en ce sens qu'un autre Esprit ne pourrait remplacer celui qui est désigné pour ce corps ; mais comme les liens qui l'y tiennent sont très faibles, ils sont facilement rompus, et ils peuvent l'être par la volonté de l'Esprit qui recule devant l'épreuve qu'il a choisie ; mais alors l'enfant ne vit pas. »

346. Qu'arrive-t-il, pour l'Esprit, si le corps qu'il a choisi vient à mourir avant de naître ?

« Il en choisit un autre. »

- Quelle peut être l'utilité de ces morts prématurées ?

« Ce sont les imperfections de la matière qui sont le plus souvent la cause de ces morts. »

347. De quelle utilité peut être pour un Esprit son incarnation dans un corps qui meurt peu de jours après sa naissance ?

« L'être n'a pas la conscience de son existence assez développée ; l'importance de la mort est presque nulle ; c'est souvent, comme nous l'avons dit, une épreuve pour les parents. »

348. L'Esprit sait-il d'avance que le corps qu'il choisit n'a pas de chance de vie ?

« Il le sait quelquefois, mais s'il le choisit pour ce motif, c'est qu'il recule devant l'épreuve. »

349. Lorsqu'une incarnation est manquée pour l'Esprit, par une cause quelconque, y est-il suppléé immédiatement par une autre existence ?

« Pas toujours immédiatement ; il faut à l'Esprit le temps de choisir de nouveau, à moins que la réincarnation instantanée ne provienne d'une détermination antérieure. »

350. L'Esprit une fois uni au corps de l'enfant, et alors qu'il n'y a plus à s'en dédire, regrette-t-il quelquefois le choix qu'il a fait ?

« Veux-tu dire si, comme homme, il se plaint de la vie qu'il a ? S'il la voudrait autre ? Oui ; s'il regrette le choix qu'il a fait ? Non ; il ne sait pas qu'il l'a choisie. L'Esprit, une fois incarné, ne peut regretter un choix dont il n'a pas conscience ; mais il peut trouver la charge trop lourde, et s'il la croit au-dessus de ses forces, c'est alors qu'il a recours au suicide. »

351. Dans l'intervalle de la conception à la naissance, l'Esprit jouit-il de toutes ses facultés ?

« Plus ou moins suivant l'époque, car il n'est pas encore incarné, mais attaché. Dès l'instant de la conception, le trouble commence à saisir l'Esprit averti par là que le moment est venu de prendre une nouvelle existence ; ce trouble va croissant jusqu'à la naissance ; dans cet intervalle, son état est à peu près celui d'un Esprit incarné pendant le sommeil du corps ; à mesure que le moment de la naissance approche, ses idées s'effacent ainsi que le souvenir du passé, dont il n'a plus conscience, comme homme, une fois entré dans la vie ; mais ce souvenir lui revient peu à peu à la mémoire dans son état d'Esprit. »

352. Au moment de la naissance, l'Esprit recouvre-t-il immédiatement la plénitude de ses facultés ?

« Non, elles se développent graduellement avec les organes. C'est pour lui une nouvelle existence ; il faut qu'il apprenne à se servir de ses instruments ; les idées lui reviennent peu à peu comme chez un homme qui sort du sommeil et qui se trouve dans une position différente de celle qu'il avait la veille. »

353. L'union de l'Esprit et du corps n'étant complète et définitivement consommée qu'après la naissance, peut-on considérer le foetus comme ayant une âme ?

« L'Esprit qui doit l'animer existe en quelque sorte en dehors de lui ; il n'a donc pas, à proprement parler, une âme, puisque l'incarnation est seulement en voie de s'opérer ; mais il est lié à celle qu'il doit posséder. »

354. Comment expliquer la vie intra-utérine ?

« C'est celle de la plante qui végète. L'enfant vit de la vie animale. L'homme possède en lui la vie animale et la vie végétale, qu'il complète à la naissance par la vie spirituelle. »

355. Y a-t-il, comme l'indique la science, des enfants qui, dès le sein de la mère, ne sont pas nés viables ; et dans quel but cela a-t-il lieu ?

« Ceci arrive souvent, Dieu le permet comme épreuve, soit pour les parents, soit pour l'Esprit désigné à prendre place. »

356. Y a-t-il des enfants mort-nés qui n'ont point été destinés à l'incarnation d'un Esprit ?

« Oui, il y en a qui n'eurent jamais un Esprit destiné pour leur corps : rien ne devait s'accomplir pour eux. C'est alors seulement pour les parents que cet enfant est venu. »

- Un être de cette nature peut-il venir à terme ?

« Oui, quelquefois, mais alors il ne vit pas. »

- Tout enfant qui survit à sa naissance a donc nécessairement un Esprit incarné en lui ?

« Que serait-il sans cela ? Ce ne serait pas un être humain. »

357. Quelles sont, pour l'Esprit, les conséquences de l'avortement ?

« C'est une existence nulle et à recommencer. »

358. L'avortement volontaire est-il un crime, quelle que soit l'époque de la conception ?

« Il y a toujours crime du moment que vous transgressez la loi de Dieu. La mère, ou tout autre, commettra toujours un crime en ôtant la vie à l'enfant avant sa naissance, car c'est empêcher l'âme de supporter les épreuves dont le corps devait être l'instrument. »

359. Dans le cas où la vie de la mère serait en danger par la naissance de l'enfant, y a-t-il crime à sacrifier l'enfant pour sauver la mère ?

« Il vaut mieux sacrifier l'être qui n'existe pas à l'être qui existe. »

360. Est-il rationnel d'avoir pour le foetus les mêmes égards que pour le corps d'un enfant qui aurait vécu ?

« Dans tout ceci, voyez la volonté de Dieu et son ouvrage ; ne traitez donc pas légèrement des choses que vous devez respecter. Pourquoi ne pas respecter les ouvrages de la création, qui sont incomplets quelquefois par la volonté du Créateur ? Ceci entre dans ses desseins que personne n'est appelé à juger. »

Facultés morales et intellectuelles.

361. D'où viennent à l'homme ses qualités morales, bonnes ou mauvaises ?
« Ce sont celles de l'Esprit qui est incarné en lui ; plus cet Esprit est pur, plus l'homme est porté au bien. »

- Il semble résulter de là que l'homme de bien est l'incarnation d'un bon Esprit, et l'homme vicieux celle d'un mauvais Esprit ?

« Oui, mais dis plutôt que c'est un Esprit imparfait, autrement on pourrait croire à des Esprits toujours mauvais, à ce que vous appelez démons. »

362. Quel est le caractère des individus dans lesquels s'incarnent les Esprits follets et légers ?

« Des étourdis, des espiègles, et quelquefois des êtres malfaisants. »

363. Les Esprits ont-ils des passions qui n'appartiennent pas à l'humanité ?

« Non, autrement ils vous les auraient communiquées. »

364. Est-ce le même Esprit qui donne à l'homme les qualités morales et celles de l'intelligence ?

« Assurément c'est le même, et cela en raison du degré auquel il est parvenu. L'homme n'a pas deux Esprits en lui. »

365. Pourquoi des hommes très intelligents, ce qui annonce en eux un Esprit supérieur, sont-ils quelquefois, en même temps, profondément vicieux ?

« C'est que l'Esprit incarné n'est pas assez pur, et l'homme cède à l'influence d'autres Esprits plus mauvais. L'Esprit progresse par une marche ascendante insensible, mais le progrès ne s'accomplit pas simultanément en tous sens ; dans une période, il peut avancer en science, dans une autre en moralité. »

366. Que penser de l'opinion d'après laquelle les différentes facultés intellectuelles et morales de l'homme seraient le produit d'autant d'Esprits divers incarnés en lui, et ayant chacun une aptitude spéciale ?

« En réfléchissant, on reconnaît qu'elle est absurde. L'Esprit doit avoir toutes les aptitudes ; pour pouvoir progresser, il lui faut une volonté unique ; si l'homme était un amalgame d'Esprits, cette volonté n'existerait pas, et il n'y aurait point pour lui d'individualité, puisqu'à sa mort tous ces Esprits seraient comme une volée d'oiseaux échappés d'une cage. L'homme se plaint souvent de ne pas comprendre certaines choses, et il est curieux de voir comme il multiplie les difficultés, tandis qu'il a sous la main une explication toute simple et toute naturelle. C'est encore là prendre l'effet pour la cause ; c'est faire pour l'homme ce que les païens faisaient pour Dieu. Ils croyaient à autant de dieux qu'il y a de phénomènes dans l'univers, mais parmi eux les gens sensés ne voyaient dans ces phénomènes que des effets ayant pour cause un Dieu unique. »

Le monde physique et le monde moral nous offrent sur ce sujet de nombreux points de comparaison. On a cru à l'existence multiple de la matière, tant qu'on s'est arrêté à l'apparence des phénomènes ; aujourd'hui on comprend que ces phénomènes si variés peuvent très bien n'être que des modifications d'une matière élémentaire unique. Les diverses facultés sont des manifestations d'une même cause qui est l'âme, ou de l'Esprit incarné, et non de plusieurs âmes, comme les différents sons de l'orgue sont le produit d'une même espèce d'air, et non d'autant de sortes d'airs qu'il y a de sons. Il résulterait de ce système que lorsqu'un homme perd ou acquiert certaines aptitudes, certains penchants, ce serait le fait d'autant d'Esprits qui viennent ou qui s'en vont, ce qui ferait de lui un être multiple sans individualité, et par conséquent sans responsabilité. Il est en outre contredit par les exemples si nombreux de manifestations par lesquels les Esprits prouvent leur personnalité et leur identité

Influence de l'organisme.

367. L'Esprit, en s'unissant au corps, s'identifie-t-il avec la matière ?
« La matière n'est que l'enveloppe de l'Esprit, comme l'habit est l'enveloppe du corps. L'Esprit, en s'unissant au corps, conserve les attributs de la nature spirituelle. »

368. Les facultés de l'Esprit s'exercent-elles en toute liberté après son union avec le corps ?

« L'exercice des facultés dépend des organes qui leur servent d'instrument ; elles sont affaiblies par la grossièreté de la matière. »

- D'après cela, l'enveloppe matérielle serait un obstacle à la libre manifestation des facultés de l'Esprit, comme un verre opaque s'oppose à la libre émission de la lumière ?

« Oui, et très opaque. »

On peut encore comparer l'action de la matière grossière du corps sur l'Esprit à celle d'une eau bourbeuse qui ôte la liberté des mouvements au corps qui s'y trouve plongé.

369. Le libre exercice des facultés de l'âme est-il subordonné au développement des organes ?

« Les organes sont les instruments de la manifestation des facultés de l'âme ; cette manifestation se trouve subordonnée au développement et au degré de perfection de ces mêmes organes, comme la bonté d'un travail à la bonté de l'outil. »

370. Peut-on induire de l'influence des organes un rapport entre le développement des organes cérébraux et celui des facultés morales et intellectuelles ?

« Ne confondez pas l'effet avec la cause. L'Esprit a toujours les facultés qui lui sont propres ; or, ce ne sont pas les organes qui donnent les facultés, mais les facultés qui poussent au développement des organes. »

- D'après cela, la diversité des aptitudes chez l'homme tient uniquement à l'état de l'Esprit ?

« Uniquement n'est pas tout à fait exact ; les qualités de l'Esprit, qui peut être plus ou moins avancé, c'est là le principe ; mais il faut tenir compte de l'influence de la matière qui entrave plus ou moins l'exercice de ses facultés. »

L'Esprit, en s'incarnant, apporte certaines prédispositions, et si l'on admet pour chacune un organe correspondant dans le cerveau, le développement de ces organes sera un effet et non une cause. Si les facultés avaient leur principe dans les organes, l'homme serait une machine sans libre arbitre et sans responsabilité de ses actes. Il faudrait admettre que les plus grands génies, savants, poètes, artistes, ne sont des génies que parce que le hasard leur a donné des organes spéciaux, d'où il suit que, sans ces organes, ils n'auraient pas été des génies, et que le dernier imbécile aurait pu être un Newton, un Virgile ou un Raphaël s'il avait été pourvu de certains organes ; supposition plus absurde encore quand on l'applique aux qualités morales. Ainsi d'après ce système, saint Vincent de Paul, doué par la nature de tel ou tel organe, aurait pu être un scélérat, et il ne manquerait au plus grand scélérat qu'un organe pour être un saint Vincent de Paul. Admettez au contraire que les organes spéciaux, si tant est qu'ils existent, sont consécutifs, qu'ils se développent par l'exercice de la faculté, comme les muscles par le mouvement, et vous n'aurez rien d'irrationnel. Prenons une comparaison triviale à force de vérité. A certains signes physiognomoniques, vous reconnaissez l'homme adonné à la boisson ; sont-ce ces signes qui le rendent ivrogne, ou l'ivrognerie qui fait naître ces signes ? On peut dire que les organes reçoivent l'empreinte des facultés.

Idiotisme, folie.

371. L'opinion selon laquelle les crétins et les idiots auraient une âme d'une nature inférieure est-elle fondée ?
« Non, ils ont une âme humaine, souvent plus intelligente que vous ne pensez, et qui souffre de l'insuffisance des moyens qu'elle a pour se communiquer, comme le muet souffre de ne pouvoir parler. »

372. Quel est le but de la Providence en créant des êtres disgraciés comme les crétins et les idiots ?

« Ce sont des Esprits en punition qui habitent des corps d'idiots. Ces Esprits souffrent de la contrainte qu'ils éprouvent et de l'impuissance où ils sont de se manifester par des organes non développés ou détraqués. »

- Il n'est donc pas exact de dire que les organes sont sans influence sur les facultés ?

« Nous n'avons jamais dit que les organes fussent sans influence ; ils en ont une très grande sur la manifestation des facultés, mais ils ne donnent pas les facultés ; là est la différence. Un bon musicien avec un mauvais instrument ne fera pas de bonne musique, et cela ne l'empêchera pas d'être un bon musicien. »

Il faut distinguer l'état normal de l'état pathologique. Dans l'état normal, le moral surmonte l'obstacle que lui oppose la matière ; mais il est des cas où la matière offre une résistance telle que les manifestations sont entravées ou dénaturées, comme dans l'idiotie et la folie ; ce sont des cas pathologiques, et dans cet état l'âme ne jouissant pas de toute sa liberté, la loi humaine elle-même l'affranchit de la responsabilité de ses actes.

373. Quel peut être le mérite de l'existence pour des êtres qui, comme les idiots et les crétins, ne pouvant faire ni bien ni mal, ne peuvent progresser ?

« C'est une expiation imposée à l'abus que l'on a pu faire de certaines facultés ; c'est un temps d'arrêt. »

- Un corps d'idiot peut ainsi renfermer un Esprit qui aurait animé un homme de génie dans une précédente existence ?

« Oui, le génie devient parfois un fléau quand on en abuse. »

La supériorité morale n'est pas toujours en raison de la supériorité intellectuelle, et les plus grands génies peuvent avoir beaucoup à expier ; de là souvent pour eux une existence inférieure à celle qu'ils ont déjà accomplie, et une cause de souffrances ; les entraves que l'Esprit éprouve dans ses manifestations sont pour lui comme les chaînes qui compriment les mouvements d'un homme vigoureux. On peut dire que le crétin et l'idiot sont estropiés par le cerveau, comme le boiteux l'est par les jambes, l'aveugle par les yeux.

374. L'idiot, à l'état d'Esprit, a-t-il la conscience de son état mental ?

« Oui, très souvent ; il comprend que les chaînes qui entravent son essor sont une épreuve et une expiation. »

375. Quelle est la situation de l'Esprit dans la folie ?

« L'Esprit, à l'état de liberté, reçoit directement ses impressions et exerce directement son action sur la matière ; mais, incarné, il se trouve dans des conditions toutes différentes, et dans la nécessité de ne le faire qu'à l'aide d'organes spéciaux. Qu'une partie ou l'ensemble de ces organes soit altéré, son action ou ses impressions, en ce qui concerne ces organes, sont interrompues. S'il perd les yeux, il devient aveugle ; si c'est l'ouïe, il devient sourd, etc.. Imagine maintenant que l'organe qui préside aux effets de l'intelligence et de la volonté soit partiellement ou entièrement attaqué ou modifié, il te sera facile de comprendre que l'Esprit n'ayant plus à son service que des organes incomplets ou dénaturés, il en doit résulter une perturbation dont l'Esprit, par lui-même et dans son for intérieur, a parfaite conscience, mais dont il n'est pas maître d'arrêter le cours. »

- C'est alors toujours le corps et non l'Esprit qui est désorganisé ?

« Oui, mais il ne faut pas perdre de vue que, de même que l'Esprit agit sur la matière, celle-ci réagit sur lui dans une certaine mesure, et que l'Esprit peut se trouver momentanément impressionné par l'altération des organes par lesquels il se manifeste et reçoit ses impressions. Il peut arriver qu'à la longue, quand la folie a duré longtemps, la répétition des mêmes actes finisse par avoir sur l'Esprit une influence dont il n'est délivré qu'après sa complète séparation de toute impression matérielle. »

376. D'où vient que la folie porte quelquefois au suicide ?

« L'Esprit souffre de la contrainte qu'il éprouve et de l'impuissance où il est de se manifester librement, c'est pourquoi il cherche dans la mort un moyen de briser ses liens. »

377. L'Esprit de l'aliéné se ressent-il après la mort du dérangement de ses facultés ?

« Il peut s'en ressentir quelque temps après la mort jusqu'à ce qu'il soit complètement dégagé de la matière, comme l'homme qui s'éveille se ressent quelque temps du trouble où le sommeil l'a plongé. »

378. Comment l'altération du cerveau peut-elle réagir sur l'Esprit après la mort ?

« C'est un souvenir ; un poids pèse sur l'Esprit, et comme il n'a pas eu l'intelligence de tout ce qui s'est passé durant sa folie, il lui faut toujours un certain temps pour se remettre au courant ; c'est pour cela que plus a duré la folie pendant la vie, plus longtemps dure la gêne, la contrainte après la mort. L'Esprit dégagé du corps se ressent quelque temps de l'impression de ses liens. »

De l'enfance.

379. L'Esprit qui anime le corps d'un enfant est-il aussi développé que celui d'un adulte ?
« Il peut l'être davantage s'il a plus progressé ; ce ne sont que les organes imparfaits qui l'empêchent de se manifester. Il agit en raison de l'instrument à l'aide duquel il peut se produire. »

380. Dans un enfant en bas âge, l'Esprit, en dehors de l'obstacle que l'imperfection des organes oppose à sa libre manifestation, pense-t-il comme un enfant ou comme un adulte ?

« Lorsqu'il est enfant, il est naturel que les organes de l'intelligence, n'étant pas développés, ne peuvent pas lui donner toute l'intuition d'un adulte ; il a, en effet, l'intelligence très bornée, en attendant que l'âge ait mûri sa raison. Le trouble qui accompagne l'incarnation ne cesse pas subitement au moment de la naissance ; il ne se dissipe que graduellement avec le développement des organes. »

Une observation vient à l'appui de cette réponse : c'est que les rêves chez un enfant n'ont pas le caractère de ceux d'un adulte ; leur objet est presque toujours puéril, ce qui est un indice de la nature des préoccupations de l'Esprit.

381. A la mort de l'enfant, l'Esprit reprend-il immédiatement sa vigueur première ?

« Il le doit, puisqu'il est débarrassé de son enveloppe charnelle ; cependant il ne reprend sa lucidité première que lorsque la séparation est complète, c'est-à-dire lorsqu'il n'existe plus aucun lien entre l'Esprit et le corps. »

382. L'Esprit incarné souffre-t-il, pendant l'enfance, de la contrainte que lui impose l'imperfection de ses organes ?

« Non ; cet état est une nécessité, il est dans la nature et selon les vues de la Providence ; c'est un temps de repos pour l'Esprit. »

383. Quelle est, pour l'Esprit, l'utilité de passer par l'état d'enfance ?

« L'Esprit s'incarnant en vue de se perfectionner, est plus accessible, pendant ce temps, aux impressions qu'il reçoit et qui peuvent aider à son avancement, auquel doivent contribuer ceux qui sont chargés de son éducation. »

384. Pourquoi les premiers cris de l'enfant sont-ils des pleurs ?

« Pour exciter l'intérêt de la mère et provoquer les soins qui lui sont nécessaires. Ne comprends-tu pas que s'il n'avait que des cris de joie, alors qu'il ne sait pas encore parler, on s'inquiéterait peu de ce dont il a besoin ? Admirez donc en tout la sagesse de la Providence. »

385. D'où vient le changement qui s'opère dans le caractère à un certain âge, et particulièrement au sortir de l'adolescence ; est-ce l'Esprit qui se modifie ?

« C'est l'Esprit qui reprend sa nature et se montre ce qu'il était.

Vous ne connaissez pas le secret que cachent les enfants dans leur innocence ; vous ne savez ce qu'ils sont, ni ce qu'ils ont été, ni ce qu'ils seront ; et pourtant vous les aimez, vous les chérissez comme s'ils étaient une partie de vous-mêmes, tellement que l'amour d'une mère pour ses enfants est réputé le plus grand amour qu'un être puisse avoir pour un autre être. D'où vient cette douce affection, cette tendre bienveillance que les étrangers eux-mêmes éprouvent envers un enfant ? Le savez-vous ? Non ; c'est cela que je vais vous expliquer.

Les enfants sont les êtres que Dieu envoie dans de nouvelles existences ; et pour qu'ils ne puissent pas lui reprocher une sévérité trop grande, il leur donne toutes les apparences de l'innocence ; même chez un enfant d'un mauvais naturel, on couvre ses méfaits de la non-conscience de ses actes. Cette innocence n'est pas une supériorité réelle sur ce qu'ils étaient avant ; non, c'est l'image de ce qu'ils devraient être, et s'ils ne le sont pas, c'est sur eux seuls qu'en retombe la peine.

Mais ce n'est pas seulement pour eux que Dieu leur a donné cet aspect, c'est aussi et surtout pour leurs parents dont l'amour est nécessaire à leur faiblesse, et cet amour serait singulièrement affaibli par la vue d'un caractère acariâtre et revêche, tandis que, croyant leurs enfants bons et doux, ils leur donnent toute leur affection, et les entourent des soins les plus délicats. Mais lorsque les enfants n'ont plus besoin de cette protection, de cette assistance qui leur a été donnée pendant quinze à vingt années, leur caractère réel et individuel reparaît dans toute sa nudité : il reste bon s'il était fondamentalement bon ; mais il s'irise toujours de nuances qui étaient cachées par la première enfance.

Vous voyez que les voies de Dieu sont toujours les meilleures, et que lorsqu'on a le coeur pur, l'explication en est facile à concevoir.

En effet, songez bien que l'Esprit des enfants qui naissent parmi vous peut venir d'un monde où il a pris des habitudes toutes différentes ; comment voudriez-vous que fût au milieu de vous ce nouvel être qui vient avec des passions tout autres que celles que vous possédez, avec des inclinations, des goûts entièrement opposés aux vôtres ; comment voudriez-vous qu'il s'incorporât dans vos rangs autrement que comme Dieu l'a voulu, c'est-à-dire par le tamis de l'enfance ? Là viennent se confondre toutes les pensées, tous les caractères, toutes les variétés d'êtres engendrés par cette foule de mondes dans lesquels grandissent les créatures. Et vous-mêmes, en mourant, vous vous trouverez dans une sorte d'enfance, au milieu de nouveaux frères ; et dans votre nouvelle existence non terrestre, vous ignorerez les habitudes, les moeurs, les rapports de ce monde nouveau pour vous ; vous manierez avec peine une langue que vous ne serez pas habitués à parler, langue plus vive que n'est aujourd'hui votre pensée. (319).

L'enfance a encore une autre utilité : les Esprits n'entrent dans la vie corporelle que pour se perfectionner, s'améliorer ; la faiblesse du jeune âge les rend flexibles, accessibles aux conseils de l'expérience et de ceux qui doivent les faire progresser ; c'est alors qu'on peut réformer leur caractère et réprimer leurs mauvais penchants ; tel est le devoir que Dieu a confié à leurs parents, mission sacrée dont ils auront à répondre.

C'est ainsi que l'enfance est non seulement utile, nécessaire, indispensable, mais encore qu'elle est la suite naturelle des lois que Dieu a établies et qui régissent l'univers. »

Sympathies et antipathies terrestres.

386. Deux êtres qui se sont connus et aimés peuvent-ils se retrouver dans une autre existence corporelle et se reconnaître ?
« Se reconnaître, non ; mais être attirés l'un vers l'autre, oui ; et souvent des liaisons intimes fondées sur une affection sincère n'ont pas d'autre cause. Deux êtres sont rapprochés l'un de l'autre par des circonstances fortuites en apparence, mais qui sont le fait de l'attraction des deux Esprits qui se cherchent à travers la foule. »

- Ne serait-il pas plus agréable pour eux de se reconnaître ?

« Pas toujours ; le souvenir des existences passées aurait des inconvénients plus grands que vous ne croyez. Après la mort, ils se reconnaîtront, ils sauront le temps qu'ils ont passé ensemble. » (392).

387. La sympathie a-t-elle toujours pour principe une connaissance antérieure ?

« Non ; deux Esprits qui se conviennent se recherchent naturellement sans qu'ils se soient connus comme hommes. »

388. Les rencontres que l'on fait quelquefois de certaines personnes et que l'on attribue au hasard, ne seraient-elles pas l'effet d'une sorte de rapports sympathiques ?

« Il y a entre les êtres pensants des liens que vous ne connaissez pas encore. Le magnétisme est le pilote de cette science que vous comprendrez mieux plus tard. »

389. D'où vient la répulsion instinctive que l'on éprouve pour certaines personnes à la première vue ?

« Esprits antipathiques qui se devinent et se reconnaissent sans se parler. »

390. L'antipathie instinctive est-elle toujours un signe de mauvaise nature ?

« Deux Esprits ne sont pas nécessairement mauvais, parce qu'ils ne sont pas sympathiques ; l'antipathie peut naître d'un manque de similitude dans la pensée ; mais à mesure qu'ils s'élèvent, les nuances s'effacent et l'antipathie disparaît. »

391. L'antipathie de deux personnes naît-elle en premier lieu chez celle dont l'Esprit est le plus mauvais ou le meilleur ?

« Chez l'une et chez l'autre, mais les causes et les effets sont différents. Un Esprit mauvais a de l'antipathie contre quiconque peut le juger et le démasquer ; en voyant une personne pour la première fois, il sait qu'il va être désapprouvé ; son éloignement se change en haine, en jalousie et lui inspire le désir de faire le mal. Le bon Esprit a de la répulsion pour le mauvais, parce qu'il sait qu'il n'en sera pas compris et qu'ils ne partagent pas les mêmes sentiments ; mais, fort de sa supériorité, il n'a contre l'autre ni haine, ni jalousie : il se contente de l'éviter et de le plaindre. »

Oubli du passé.

392. Pourquoi l'Esprit incarné perd-il le souvenir de son passé ?
« L'homme ne peut ni ne doit tout savoir ; Dieu le veut ainsi dans sa sagesse. Sans le voile qui lui couvre certaines choses, l'homme serait ébloui, comme celui qui passe sans transition de l'obscurité à la lumière. Par l'oubli du passé il est plus lui-même. »

393. Comment l'homme peut-il être responsable d'actes et racheter des fautes dont il n'a pas le souvenir ? Comment peut-il profiter de l'expérience acquise dans des existences tombées dans l'oubli ? On concevrait que les tribulations de la vie fussentune leçon pour lui s'il se rappelait ce qui a pu les lui attirer ; mais du moment qu'il ne s'en souvient pas, chaque existence est pour lui comme si elle était la première, et c'est ainsi toujours à recommencer. Comment concilier cela avec la justice de Dieu ?

« A chaque existence nouvelle, l'homme a plus d'intelligence et peut mieux distinguer le bien et le mal. Où serait le mérite, s'il se rappelait tout le passé ? Lorsque l'Esprit rentre dans sa vie primitive (la vie spirite), toute sa vie passée se déroule devant lui ; il voit les fautes qu'il a commises et qui sont cause de sa souffrance, et ce qui aurait pu l'empêcher de les commettre ; il comprend que la position qui lui est donnée est juste, et cherche alors l'existence qui pourrait réparer celle qui vient de s'écouler. Il cherche des épreuves analogues à celles par lesquelles il a passé, ou les luttes qu'il croit propres à son avancement, et demande à des Esprits qui lui sont supérieurs de l'aider dans cette nouvelle tâche qu'il entreprend, car il sait que l'Esprit qui lui sera donné pour guide dans cette nouvelle existence cherchera à lui faire réparer ses fautes en lui donnant une espèce d'intuition de celles qu'il a commises. Cette même intuition est la pensée, le désir criminel qui vous vient souvent, et auquel vous résistez instinctivement, attribuant la plupart du temps votre résistance aux principes que vous avez reçus de vos parents, tandis que c'est la voix de la conscience qui vous parle, et cette voix est le souvenir du passé, voix qui vous avertit de ne pas retomber dans les fautes que vous avez déjà commises. L'Esprit entré dans cette nouvelle existence, s'il subit ces épreuves avec courage et s'il résiste, s'élève et monte dans la hiérarchie des Esprits, lorsqu'il revient parmi eux. »

Si nous n'avons pas, pendant la vie corporelle, un souvenir précis de ce que nous avons été, et de ce que nous avons fait de bien ou de mal dans nos existences antérieures, nous en avons l'intuition, et nos tendances instinctives sont une réminiscence de notre passé, auxquelles notre conscience, qui est le désir que nous avons conçu de ne plus commettre les mêmes fautes, nous avertit de résister.

394. Dans les mondes plus avancés que le nôtre, où l'on n'est point en proie à tous nos besoins physiques, à nos infirmités, les hommes comprennent-ils qu'ils sont plus heureux que nous ? Le bonheur, en général, est relatif ; on le sent par comparaison avec un état moins heureux. Comme en définitive quelques-uns de ces mondes, quoique meilleurs que le nôtre, ne sont pas à l'état de perfection, les hommes qui les habitent doivent avoir des sujets d'ennui dans leur genre. Parmi nous, le riche, de ce qu'il n'a pas les angoisses des besoins matériels comme le pauvre, n'en a pas moins des tribulations qui rendent sa vie amère. Or, je demande si, dans leur position, les habitants de ces mondes ne se croient pas aussi malheureux que nous et ne se plaignent pas de leur sort, n'ayant pas le souvenir d'une existence inférieure pour comparaison ?

« A cela, il faut faire deux réponses différentes. Il y a des mondes, parmi ceux dont tu parles, dont les habitants ont un souvenir très net et très précis de leurs existences passées ; ceux-là, tu le comprends, peuvent et savent apprécier le bonheur que Dieu leur permet de savourer ; mais il y en a d'autres où les habitants placés, comme tu le dis, dans de meilleures conditions que vous, n'en ont pas moins de grands ennuis, des malheurs même ; ceux-là n'apprécient pas leur bonheur par cela même qu'ils n'ont pas le souvenir d'un état encore plus malheureux. S'ils ne l'apprécient pas comme hommes, ils l'apprécient comme Esprits. »

N'y a-t-il pas dans l'oubli de ces existences passées, alors surtout qu'elles ont été pénibles, quelque chose de providentiel, et où se révèle la sagesse divine ? C'est dans les mondes supérieurs, lorsque le souvenir des existences malheureuses n'est plus qu'un mauvais rêve, qu'elles se présentent à la mémoire. Dans les mondes inférieurs, les malheurs présents ne seraient-ils pas aggravés par le souvenir de tous ceux que l'on a pu endurer ? Concluons donc de là que tout ce que Dieu a fait est bien fait, et qu'il ne nous appartient pas de critiquer ses oeuvres, et de dire comment il aurait dû régler l'univers.

Le souvenir de nos individualités antérieures aurait des inconvénients très graves ; il pourrait, dans certains cas, nous humilier étrangement ; dans d'autres, exalter notre orgueil, et, par cela même, entraver notre libre arbitre. Dieu nous a donné, pour nous améliorer, juste ce qui nous est nécessaire et peut nous suffire : la voix de la conscience et nos tendances instinctives ; il nous ôte ce qui pourrait nous nuire. Ajoutons encore que si nous avions le souvenir de nos actes antérieurs personnels, nous aurions également celui des actes d'autrui, et que cette connaissance pourrait avoir les plus fâcheux effets sur les relations sociales ; n'ayant pas toujours lieu de nous glorifier de notre passé, il est souvent heureux qu'un voile soit jeté dessus. Ceci concorde parfaitement avec la doctrine des Esprits sur les mondes supérieurs au nôtre. Dans ces mondes, où ne règne que le bien, le souvenir du passé n'a rien de pénible ; voilà pourquoi on s'y souvient de son existence précédente comme nous nous souvenons de ce que nous avons fait la veille. Quant au séjour qu'on a pu faire dans les mondes inférieurs, ce n'est plus, comme nous l'avons dit, qu'un mauvais rêve.

395. Pouvons-nous avoir quelques révélations sur nos existences antérieures ?

« Pas toujours. Plusieurs savent cependant ce qu'ils ont été et ce qu'ils faisaient ; s'il leur était permis de le dire hautement, ils feraient de singulières révélations sur le passé. »

396. Certaines personnes croient avoir un vague souvenir d'un passé inconnu qui se présente à elles comme l'image fugitive d'un songe que l'on cherche en vain à saisir. Cette idée n'est-elle qu'une illusion ?

« C'est quelquefois réel ; mais souvent aussi c'est une illusion contre laquelle il faut se mettre en garde, car cela peut être l'effet d'une imagination surexcitée. »

397. Dans les existences corporelles d'une nature plus élevée que la nôtre, le souvenir des existences antérieures est-il plus précis ?

« Oui, à mesure que le corps est moins matériel on se souvient mieux. Le souvenir du passé est plus clair pour ceux qui habitent les mondes d'un ordre supérieur. »

398. Les tendances instinctives de l'homme étant une réminiscence de son passé, s'ensuit-il que, par l'étude de ces tendances, il puisse connaître les fautes qu'il a commises ?

« Sans doute, jusqu'à un certain point ; mais il faut tenir compte de l'amélioration qui a pu s'opérer dans l'Esprit et des résolutions qu'il a prises à l'état errant ; l'existence actuelle peut être de beaucoup meilleure que la précédente. »

- Peut-elle être plus mauvaise ; c'est-à-dire l'homme peut-il commettre dans une existence des fautes qu'il n'a pas commises dans l'existence précédente ?

« Cela dépend de son avancement ; s'il ne sait pas résister aux épreuves, il peut être entraîné à de nouvelles fautes qui sont la conséquence de la position qu'il a choisie ; mais en général, ces fautes accusent plutôt un état stationnaire qu'un état rétrograde, car l'Esprit peut avancer ou s'arrêter, mais il ne recule pas. »

399. Les vicissitudes de la vie corporelle étant à la fois une expiation pour les fautes passées et des épreuves pour l'avenir, s'ensuit-il que, de la nature de ces vicissitudes on puisse en induire le genre de l'existence antérieure ?

« Très souvent, puisque chacun est puni par où il a péché ; cependant, il ne faudrait pas en faire une règle absolue ; les tendances instinctives sont un indice plus certain, car les épreuves que subit l'Esprit sont autant pour l'avenir que pour le passé. »

Arrivé au terme marqué par la Providence pour sa vie errante, l'Esprit choisit lui-même les épreuves auxquelles il veut se soumettre pour hâter son avancement, c'est-à-dire le genre d'existence qu'il croit le plus propre à lui en fournir les moyens, et ces épreuves sont toujours en rapport avec les fautes qu'il doit expier. S'il en triomphe, il s'élève ; s'il succombe, c'est à recommencer.

L'Esprit jouit toujours de son libre arbitre ; c'est en vertu de cette liberté qu'à l'état d'Esprit il choisit les épreuves de la vie corporelle, et qu'à l'état d'incarnation il délibère s'il fera ou s'il ne fera pas, et choisit entre le bien et le mal. Dénier à l'homme le libre arbitre, serait le réduire à l'état de machine.

Rentré dans la vie corporelle, l'Esprit perd momentanément le souvenir de ses existences antérieures, comme si un voile les lui dérobait ; toutefois, il en a quelquefois une vague conscience, et elles peuvent même lui être révélées en certaines circonstances ; mais alors ce n'est que par la volonté des Esprits supérieurs qui le font spontanément, dans un but utile, et jamais pour satisfaire une vaine curiosité.

Les existences futures ne peuvent être révélées dans aucun cas, par la raison qu'elles dépendent de la manière dont on accomplit l'existence présente, et du choix ultérieur de l'Esprit.

L'oubli des fautes commises n'est pas un obstacle à l'amélioration de l'Esprit, car s'il n'en a pas un souvenir précis, la connaissance qu'il en avait à l'état errant et le désir qu'il a conçu de les réparer, le guident par intuition et lui donnent la pensée de résister au mal ; cette pensée est la voix de la conscience, dans laquelle il est secondé par les Esprits qui l'assistent s'il écoute les bonnes inspirations qu'ils lui suggèrent.

Si l'homme ne connaît pas les actes mêmes qu'il a commis dans ses existences antérieures, il peut toujours savoir de quel genre de fautes il s'est rendu coupable et quel était son caractère dominant. Il lui suffit de s'étudier lui-même, et il peut juger de ce qu'il a été, non par ce qu'il est, mais par ses tendances.

Les vicissitudes de la vie corporelle sont à la fois une expiation pour les fautes passées et des épreuves pour l'avenir. Elles nous épurent et nous élèvent, selon que nous les subissons avec résignation et sans murmure.

La nature des vicissitudes et des épreuves que nous subissons peut aussi nous éclairer sur ce que nous avons été et sur ce que nous avons fait, comme ici-bas nous jugeons les faits d'un coupable par le châtiment que lui inflige la loi. Ainsi, tel sera châtié dans son orgueil par l'humiliation d'une existence subalterne ; le mauvais riche et l'avare, par la misère ; celui qui a été dur pour les autres, par les duretés qu'il subira ; le tyran, par l'esclavage ; le mauvais fils, par l'ingratitude de ses enfants ; le paresseux, par un travail forcé, etc..


CHAPITRE VIII
EMANCIPATION DE L'AME

1. Le sommeil et les rêves. - 2. Visites spirites entre personnes vivantes.


3. Transmission occulte de la pensée. - 4. Léthargie, catalepsie. Morts apparentes. - 5. Somnambulisme. - 6. Extase. - 7. Seconde vue.
8. Résumé théorique du somnambulisme, de l'extase et de la seconde vue.

Le sommeil et les rêves.

400. L'Esprit incarné demeure-t-il volontiers sous son enveloppe corporelle ?
« C'est comme si tu demandais si le prisonnier se plaît sous les verrous. L'Esprit incarné aspire sans cesse à la délivrance, et plus l'enveloppe est grossière, plus il désire en être débarrassé. »

401. Pendant le sommeil, l'âme se repose-t-elle comme le corps ?

« Non, l'Esprit n'est jamais inactif. Pendant le sommeil, les liens qui l'unissent au corps sont relâchés, et le corps n'ayant pas besoin de lui, il parcourt l'espace, et entre en relation plus directe avec les autres Esprits. »

402. Comment pouvons-nous juger de la liberté de l'Esprit pendant le sommeil ?

« Par les rêves. Crois bien que lorsque le corps repose, l'Esprit a plus de facultés que dans la veille ; il a le souvenir du passé et quelquefois prévision de l'avenir ; il acquiert plus de puissance et peut entrer en communication avec les autres Esprits, soit dans ce monde, soit dans un autre. Souvent, tu dis : J'ai fait un rêve bizarre, un rêve affreux, mais qui n'a aucune vraisemblance ; tu te trompes ; c'est souvent un souvenir des lieux et des choses que tu as vus ou que tu verras dans une autre existence ou à un autre moment. Le corps étant engourdi, l'Esprit tâche de briser sa chaîne en cherchant dans le passé ou dans l'avenir.

Pauvres hommes, que vous connaissez peu les phénomènes les plus ordinaires de la vie ! Vous croyez être bien savants, et les choses les plus vulgaires vous embarrassent ; à cette question de tous les enfants : qu'est-ce que nous faisons quand nous dormons ? Qu'est-ce que c'est que les rêves ? Vous restez interdits.

Le sommeil délivre en partie l'âme du corps. Quand on dort, on est momentanément dans l'état où l'on se trouve d'une manière fixe après la mort. Les Esprits qui sont tôt dégagés de la matière à leur mort ont eu des sommeils intelligents ; ceux-là, quand ils dorment, rejoignent la société des autres êtres supérieurs à eux : ils voyagent, causent et s'instruisent avec eux ; ils travaillent même à des ouvrages qu'ils trouvent tout faits en mourant. Ceci doit vous apprendre une fois de plus à ne pas craindre la mort, puisque vous mourez tous les jours selon la parole d'un saint.

Voilà pour les Esprits élevés ; mais pour la masse des hommes qui, à la mort, doivent rester de longues heures dans ce trouble, dans cette incertitude dont ils vous ont parlé, ceux-là vont, soit dans des mondes inférieurs à la terre, où d'anciennes affections les rappellent, soit chercher des plaisirs peut-être encore plus bas que ceux qu'ils ont ici ; ils vont puiser des doctrines encore plus viles, plus ignobles, plus nuisibles que celles qu'ils professent au milieu de vous. Et ce qui engendre la sympathie sur la terre n'est pas autre chose que ce fait qu'on se sent, au réveil, rapproché par le coeur de ceux avec qui on vient de passer huit à neuf heures de bonheur ou de plaisir. Ce qui explique aussi ces antipathies invincibles, c'est qu'on sait au fond de son coeur que ces gens-là ont une autre conscience que la nôtre, parce qu'on les connaît sans les avoir jamais vus avec les yeux. C'est encore ce qui explique l'indifférence, puisqu'on ne tient pas à faire de nouveaux amis, lorsqu'on sait qu'on en a d'autres qui nous aiment et nous chérissent. En un mot, le sommeil influe plus que vous ne pensez sur votre vie.

Par l'effet du sommeil, les Esprits incarnés sont toujours en rapport avec le monde des Esprits, et c'est ce qui fait que les Esprits supérieurs consentent, sans trop de répulsion, à s'incarner parmi vous. Dieu a voulu que pendant leur contact avec le vice, ils pussent aller se retremper à la source du bien, pour ne pas faillir eux-mêmes, eux qui venaient instruire les autres. Le sommeil est la porte que Dieu leur a ouverte vers leurs amis du ciel ; c'est la récréation après le travail, en attendant la grande délivrance, la libération finale qui doit les rendre à leur vrai milieu.

Le rêve est le souvenir de ce que votre Esprit a vu pendant le sommeil ; mais remarquez que vous ne rêvez pas toujours, parce que vous ne vous souvenez pas toujours de ce que vous avez vu, ou de tout ce que vous avez vu. Ce n'est pas votre âme dans tout son développement ; ce n'est souvent que le souvenir du trouble qui accompagne votre départ ou votre rentrée, auquel se joint celui de ce que vous avez fait ou de ce qui vous préoccupe dans l'état de veille ; sans cela, comment expliqueriez-vous ces rêves absurdes que font les plus savants comme les plus simples ? Les mauvais Esprits se servent aussi des rêves pour tourmenter les âmes faibles et pusillanimes.

Au reste, vous verrez dans peu se développer une autre espèce de rêves ; elle est aussi ancienne que celle que vous connaissez, mais vous l'ignorez. Le rêve de Jeanne, le rêve de Jacob, le rêve des prophètes juifs et de quelques devins indiens : ce rêve-là est le souvenir de l'âme entièrement dégagée du corps, le souvenir de cette seconde vie dont je vous parlais tout à l'heure.

Cherchez bien à distinguer ces deux sortes de rêves dans ceux dont vous vous souviendrez ; sans cela vous tomberiez dans des contradictions et dans des erreurs qui seraient funestes à votre foi. »

Les rêves sont le produit de l'émancipation de l'âme rendue plus indépendante par la suspension de la vie active et de relation. De là une sorte de clairvoyance indéfinie qui s'étend aux lieux les plus éloignés ou que l'on n'a jamais vus, et quelquefois même à d'autres mondes. De là encore le souvenir qui retrace à la mémoire les événements accomplis dans l'existence présente ou dans les existences antérieures ; l'étrangeté des images de ce qui se passe ou s'est passé dans des mondes inconnus, entremêlées des choses du monde actuel, forment ces ensembles bizarres et confus qui semblent n'avoir ni sens ni liaison.

L'incohérence des rêves s'explique encore par les lacunes que produit le souvenir incomplet de ce qui nous est apparu en songe. Tel serait un récit dont on aurait tronqué au hasard des phrases ou des parties de phrases : les fragments qui resteraient étant réunis perdraient toute signification raisonnable.

403. Pourquoi ne se rappelle-t-on pas toujours les rêves ?

« Dans ce que tu appelles le sommeil, ce n'est que le repos du corps, car l'Esprit est toujours en mouvement ; là, il recouvre un peu de sa liberté, et correspond avec ceux qui lui sont chers, soit dans ce monde, soit dans d'autres ; mais comme le corps est une matière lourde et grossière, il conserve difficilement les impressions qu'a reçues l'Esprit, parce que l'Esprit ne les a pas perçues par les organes du corps. »

404. Que penser de la signification attribuée aux rêves ?

« Les rêves ne sont point vrais comme l'entendent les diseurs de bonne aventure, car il est absurde de croire que rêver de telle chose annonce telle chose. Ils sont vrais en ce sens qu'ils présentent des images réelles pour l'Esprit, mais qui souvent n'ont pas de rapport avec ce qui se passe dans la vie corporelle ; souvent aussi, comme nous l'avons dit, c'est un souvenir ; ce peut être enfin quelquefois un pressentiment de l'avenir, si Dieu le permet, ou la vue de ce qui se passe à ce moment dans un autre lieu et où l'âme se transporte. N'avez-vous pas de nombreux exemples que des personnes apparaissent en songe et viennent avertir leurs parents ou leurs amis de ce qui leur arrive ? Qu'est-ce que c'est que ces apparitions, sinon l'âme ou l'Esprit de ces personnes qui vient communiquer avec le vôtre ? Quand vous acquérez la certitude que ce que vous avez vu a réellement eu lieu, n'est-ce pas une preuve que l'imagination n'y est pour rien, si surtout cette chose n'était nullement dans votre pensée pendant la veille ? »

405. On voit souvent en rêve des choses qui semblent des pressentiments et qui ne s'accomplissent pas ; d'où cela vient-il ?

« Elles peuvent s'accomplir pour l'Esprit, sinon pour le corps, c'est-à-dire que l'Esprit voit la chose qu'il désire parce qu'il va la trouver. Il ne faut pas oublier que, pendant le sommeil, l'âme est toujours plus ou moins sous l'influence de la matière, et que, par conséquent, elle ne s'affranchit jamais complètement des idées terrestres ; il en résulte que les préoccupations de la veille peuvent donner à ce que l'on voit l'apparence de ce que l'on désire ou de ce que l'on craint ; c'est là véritablement ce que l'on peut appeler un effet de l'imagination. Lorsqu'on est fortement préoccupé d'une idée, on y rattache tout ce que l'on voit. »

406. Lorsque nous voyons en rêve des personnes vivantes, que nous connaissons parfaitement, accomplir des actes auxquels elles ne songent nullement, n'est-ce pas un effet de pure imagination ?

« Auxquels elles ne songent nullement, qu'en sais-tu ? Leur Esprit peut venir visiter le tien, comme le tien peut visiter le leur, et tu ne sais pas toujours à quoi il pense. Et puis souvent aussi vous appliquez à des personnes que vous connaissez, et selon vos désirs, ce qui s'est passé ou se passe dans d'autres existences. »

407. Le sommeil complet est-il nécessaire pour l'émancipation de l'Esprit ?

« Non l'Esprit recouvre sa liberté quand les sens s'engourdissent ; il profite, pour s'émanciper, de tous les instants de répit que lui laisse le corps. Dès qu'il y a prostration des forces vitales, l'Esprit se dégage, et plus le corps est faible, plus l'Esprit est libre. »

C'est ainsi que le demi-sommeil, ou un simple engourdissement des sens, présente souvent les mêmes images que le rêve.

408. Il nous semble quelquefois entendre en nous-mêmes des mots prononcés distinctement et qui n'ont aucun rapport avec ce qui nous préoccupe, d'où cela vient-il ?

« Oui, et même des phrases tout entières, surtout quand les sens commencent à s'engourdir. C'est quelquefois un faible écho d'un Esprit qui veut communiquer avec toi. »

409. Souvent, dans un état qui n'est pas encore le demi-sommeil, lorsque nous avons les yeux fermés, nous voyons des images distinctes, des figures dont nous saisissons les plus minutieux détails ; est-ce un effet de vision ou d'imagination ?

« Le corps étant engourdi, l'Esprit cherche à briser sa chaîne : il se transporte et voit ; si le sommeil était complet, ce serait un rêve. »

410. On a quelquefois pendant le sommeil ou le demi-sommeil des idées qui semblent très bonnes, et qui, malgré les efforts que l'on fait pour se les rappeler, s'effacent de la mémoire ; d'où viennent ces idées ?

« Elles sont le résultat de la liberté de l'Esprit qui s'émancipe et jouit de plus de facultés pendant ce moment. Ce sont souvent aussi des conseils que donnent d'autres Esprits. »

- A quoi servent ces idées et ces conseils, puisqu'on en perd le souvenir et qu'on ne peut en profiter ?

« Ces idées appartiennent quelquefois plus au monde des Esprits qu'au monde corporel ; mais le plus souvent si le corps oublie, l'Esprit se souvient, et l'idée revient au moment nécessaire comme une inspiration du moment. »

411. L'Esprit incarné, dans les moments où il est dégagé de la matière et agit comme Esprit, sait-il l'époque de sa mort ?

« Souvent il la pressent ; quelquefois il en a la conscience très nette, et c'est ce qui, dans l'état de veille, lui en donne l'intuition ; de là vient que certaines personnes prévoient quelquefois leur mort avec une grande exactitude. »

412. L'activité de l'Esprit pendant le repos ou le sommeil du corps, peut-elle faire éprouver de la fatigue à ce dernier ?

« Oui, car l'Esprit tient au corps, comme le ballon captif tient au poteau ; or, de même que les secousses du ballon ébranlent le poteau, l'activité de l'Esprit réagit sur le corps, et peut lui faire éprouver de la fatigue. »

 

 

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